Selon Ricardo Tranjan, auteur du livre The Tenant Class, nos politiciens doivent désormais choisir d’appuyer les locataires d’immeubles.
L’inabordabilité immobilière est un sujet récurrent dans les médias canadiens, à peine une semaine s’écoule-t-elle sans que nous entendions de nouvelles découvertes, qui sont décourageants, a ce qui a trait à la location d’immeuble résidentiel.
La location d’immeubles résidentiels abordables, destinée aux familles québécoises, est un besoin nécessaire au bon fonctionnement de notre société. Pour la majorité des familles sur notre territoire; ce n’est qu’une question de survie.
Dans une société où l’accession à l’achat d’une propriété est la marque d’une vie bourgeoise réussie, les locataires se heurtent à des mythes et des mensonges qui dénigrent son image publique. En surcroit, notre société dépeint la location immobilière comme une situation indésirable, comme un échec ou un projet de vie inachevé.
Un des mythes le plus répandus est que la location d’un immeuble est une phase transitoire; c’est essentiellement pour les jeunes qui vont un jour eux-mêmes acheter un immeuble. Un sondage Angus Reid en 2021 confirme que la location d’un immeuble n’est pas une phase transitoire pour plusieurs de nos concitoyens.
Le même sondage nous confirme que 93 % des locataires d’immeuble, qui ont répondu à celui-ci, n’arrêteront pas de louer de sitôt. Par conséquent, la population du Québec se chiffre à 8.7M en 2023, donc 2.45M ont l’intention de continuer à louer dans le futur. Concrètement, c’est le tiers de la population qui ne pourra capitaliser leur richesse dans le secteur de l’immobilier.
Et pire encore, leur sécurité financière est devenue un enjeu important pour notre société. Voici un exemple chiffré pour mieux comprendre la situation des locataires d’immeuble résidentiel :
Le salaire moyen canadien est approximativement 75,000$ par année. Ce même salaire, lorsque nous appliquons les déductions à la source comme l’impôt du Québec, il reste environ 3,200$ net par mois. Selon les statistiques de la firme APPARTOGO, un simple 4 ½ au Québec coute environ 1,674$ par mois. Donc, le ratio frais de logement au revenu se chiffre à environ 52%. Est-il possible de vivre, épargner et contrer l’inflation avec 1,526$ par mois ?
Pas de crise immobilière
Une crise, au sens classique du mot, est une situation urgente, temporaire et qui doit être dressée immédiatement. Or, le récit dominant de la « crise du logement », n’est aucunement temporaire, mais plutôt une situation permanente, sans issu, ni de fin.
Le problème avec le récit de la « crise du logement » est qu’il exonère les propriétaires/promoteurs immobilières et les gouvernements de toute responsabilité. Ils nous suggèrent que les loyers excessifs sont la responsabilité des locataires, et que leur manque à gagner, en matière de revenu, requière une solution technique, et non, une solution politique.
Il existe une justification claire pour revenir à nos bonnes habitudes politiques des 1970. Le député libéral Robert Andras – un membre éternel du cabinet Pierre Trudeau – déclaré en 1969 :
« Nous devons non seulement améliorer le fonctionnement des marchés privés afin d’accélérer la production totale de logements, mais nous devons également stimuler la fourniture de logements modestes aux personnes à faible revenu ».
Selon l’analyste du logement, soit Greg Suttor, de 1965 à 1990, 10 % de la production totale de logements résidentiels était à but non lucratif, public ou même coopératif.
Certes, les experts de l’immobilier affirment que le marché privé est adéquat, et que le vrai problème se situe on niveau de l’offre. Selon ces mêmes experts, l’offre ne rattrape pas assez rapidement la demande. Par conséquent, si nous construisons plus de logements, dit-on, les gens auront plus de choix et les loyers seront moins chers.
Bullshit…
La loi de l’offre et de la demande, selon laquelle les prix baissent si l’offre dépasse la demande, fonctionne bien lorsque nous devons analyser des fruits et légumes. Ainsi, le marché immobilier n’est pas un marché optimal et il ne sera guère équilibré, et ce, jamais.
Pourquoi ? D’abord, les terrains sont une ressource fixe, non périssable et qui augmente en valeur avec le temps. Ensuite, le Canada a décidé d’amplifier l’arrivée de nouveaux immigrants, et ce, depuis plusieurs années. Finalement, les lois de zonage municipales ont largement paralysé toute capacité des promoteurs immobiliers à construire avec une l’intensité fébrile.
Désormais, le marché locataire privé, destiné pour l’habitation, occupe la majorité de la production totale de logements. Il est clair maintenant que notre système de location d’immeuble privé est inéquitable et inefficace. C’est un système fondé sur les inégalités structurelles et exploite les opportunités économiques sociétaires, d’un groupe de nos concitoyens, en besoin d’avoir « un toit sur la tête ».